Cette décision qui crée depuis cinq mois un déficit de produit Sonocc dans les points et dépôts de vente du ciment à Brazzaville, défraie la chronique et alarme les commerçants.
Elle fait suite à une controverse née en janvier 2014 entre la société et le ministère de tutelle, notamment sur l’augmentation des taxes, les frais de transport et la réduction du prix du ciment produit par la Sonocc.
Selon les responsables de la société, les ministères de transports et du commerce auraient décidé unilatéralement d’augmenter les frais de transport de ciment à dix-huit millions FCFA par trimestre, tandis qu’ils revenaient à quinze millions et de réduire le prix de la tonne à 79.000 FCFA à Loutété et 91.000 FCFA à Brazzaville, en ajoutant 5% pour la taxe sur la valeur ajouté (Tva) et 5% pour le centime additionnel. Or, dans la convention régissant leur coopération, le prix de la tonne était fixé à cent-cinq mille FCFA et celui d'un sac à 5.900FCFA.
« Avec le ministère du commerce, le différend porte sur les frais de transport, les taxes et prix qu’il nous ont imposé sans tenir compte de nos charges. Toutes ces charges considérées, nous tournerons à perte si l’on continuait à transporter le ciment à Brazzaville, car nous louons aussi les wagons. Pour ce faire, compte tenu des difficultés que nous éprouvons, nous avions décidé de restituer les wagons au CFCO pour ne plus emmener le ciment par train, en attendant que le problème soit réglé », a déclaré le directeur général de la Sonocc, Wei Xinbang.
Par ailleurs, outre le problème de la révision des prix, le ministère aurait, selon les responsables de la société, imposé à leur structure un schéma inadéquat et ferait écran à la Sonoc qui n’a pas de visibilité sur son marché et n’a aucune information fiable sur la concurrence. Ce manque d’information, estiment les responsables de la Sonocc, handicape leur développement, car la société ne pourra pas bâtir une meilleure stratégie de commercialisation.
« Notre entreprise se trouve dans une position inconfortable. On accuse une grande défaillance financière. C’est pourquoi, nous avions introduit une requête auprès du ministère afin que nous augmentions le prix de la tonne à 125.000 FCFA, mais on n’a pas eu une suite favorable » précise le directeur général, ajoutant que les autres sociétés vendent à 140.000 FCFA sans problème.
D’après Wei Xinbang, environ vingt-cinq mille tonnes de ciment seraient stockés à Loutété et que son entreprise emploierait plus de trois-cent personnes de nationalité congolaise.
Avec une capacité de production estimée à 210 mille tonnes, six mille tonnes par an, soit 21 mille tonnes par mois, la Sonocc connait huit rotations par mois de transport de ciment vers Brazzaville.
Chaque rotation convoie 552 tonnes pour douze wagons d’une capacité de quarante-six tonnes.
« Nous sommes sur un projet d’extension de la société qui à termes sera capable de produire quatre cent mille tonnes par année. Si le problème n’est pas réglé à temps, tout le personnel risquerait de se trouver dans une situation difficile avec de retard de salaires », a souligné le Directeur général.
La Sonocc veut vendre elle-même son ciment
Pour les dirigeants de la Sonocc, depuis le début de ses activités, en 2003, le ministère du commerce joue le rôle d’intermédiaire dans la distribution de son produit. Mais, son implication n’a pas répondu à leurs attentes.
« Il est clairement établi que lorsqu’un fabriquant n’est pas autorisé à vendre directement son propre produit, il fera à coup sûr piètre figure en ce qui concerne le rendement final », a indiqué le directeur commercial de la Sonocc, Bienvenu Dombi.
Conformément à son objectif d’offrir aux congolais un produit de bonne qualité à moindre coût en tenant compte des difficultés des populations, surtout celles de l’intérieur du pays, la Sonocc ne s’est jamais départie de sa vocation de produire et de distribuer son produit sur toute l’étendue du territoire national.
« Il revient donc à la Sonocc le droit de commercialiser son produit sans qu’elle soit obligée de passer par un intermédiaire », a ajouté, le directeur commercial.
Parlant de l’influence du ministère du commerce considéré comme un « frein pour l’évolution de la société » parce qu’intervenant directement dans le circuit de vente de leur produit, Wei Xinbang a reconnu que depuis leur création, ils n’assurent que la production et non la commercialisation.
Cette responsabilité revenait au ministère du commerce, ce qui aurait, selon lui occasionner des problèmes d’inflation des prix au point où le sac de ciment qui devrait être vendu à 5.900 FCFA, coûte un peu plus du montant fixé, tant à Brazzaville qu’à l’intérieur du pays créant ainsi des conflits d’intérêts ; la désorganisation dans la politique de vente ; la mauvaise répartition des ventes du ciment au profit des populations et l’inexistence des points de vente en gros qui facilite dans d’autres localité, sauf sur l’axe Loutété-Brazzaville.
« Toute entreprise de production doit maitriser le système de la chaine de distribution de son produit pour mieux contrôler son prix à la consommation et éradiquer les phénomènes nuisibles », a-t-il encore précisé.
La révision des prix et l’imposition des taxes est une politique de l’Etat.
Pour le ministère de tutelle, l’idée de fixer les taxes et de réviser à la baisse le prix du ciment produit par la Sonocc, adhère à la politique mise en place par gouvernement dans le cadre de la lutte contre la vie chère.
Elle s’appuie sur l’arrêté n° 2002/PR-cab fixant les modalités d’application du décret n°2007-152 du 12 février 2007 portant libéralisation de l’importation et du prix du ciment vu que le ministère a une mission d’arbitrage et de régulation de l’activité commerciale dans le pays.
Pour le ministère du commerce, la création de la Sonocc obéissait à la baisse du prix du ciment sur le marché. C’est dans cette optique qu’il a été mis en place des dépôts de référence pour contrôler son prix.
«Environ 40 points de vente ont été créés à Brazzaville et sont animés par 420 commerçants repartie en équipe de dix personnes reconnues par le ministère. Cela nous permet de bien lutter contre l’inflation des prix », a déclaré l’administrateur et président des commerçants évoluant auprès du ministère du commerce, Bienvenu Bikouta.
Le prix du ciment doit être soumis au contrôle du ministère
Parlant de la notification des prix et des lois qui régissent le secteur commercial au Congo, le directeur de cabinet du ministre du commerce et des approvisionnements, André Kamba a précisé qu’en matière des prix, il y a certains nombre de produits dont les prix sont homologués et d’autres non. Concernant le ciment, a-t-il rappelé, en dépit du décret N°2007/152 du 12 février 2007, signé par le président de la République et qui autorise la libéralisation de l’importation et du prix du ciment au Congo, son prix doit toujours être soumis au contrôle du ministère en charge du commerce.
« Nous devrions rester vigilent afin d’éviter l’inflation. Notre objectif est de voir le prix du ciment descendre même à 4000 FCFA le sac », a souligné, le directeur de cabinet.
Les prix imposés par le ministère à la Sonocc découlent d’un consensus
Justifiant leur décision de baisser le prix du ciment, André Kamba a précisé que l’homologation des prix ne se fait pas au hasard. Elle se fait sur la base des charges de production en tenant compte du niveau des marges accordées par l’Etat pour proposer aux producteurs le niveau maximum du prix de vente.
« C’est le cas de la Sonocc avec qui nous avions travaillé ensemble à Loutété et de commun accord élaboré les données consensuelles de prix, intitulées structure des prix du ciment Sonocc », argumente André Kamba.
D’après ces données issues d’une enquête, la tonne du ciment que produit la Sonocc devrait désormais coûter 91.000 FCFA au lieu de 105.000 FCFA comme avant et le sac à 4.900 FCFA.
« La Sonocc nous avait écrit pour solliciter l’augmentation du prix de son ciment à 125.000 FCFA. On s’est accordé avec eux afin qu’une équipe technique soit envoyée à Loutété pour regarder toutes leurs charges et établir le niveau de charge pour fixer le prix. Pour nous, ce qui est important c’est le prix sur le marché et non à l’usine », nous a-t-il confié tout en notant qu’après les résultats de cette commission, il a été conclu qu’il sera inséré au prix du ciment, le coût du transport par CFCO de Loutété à Brazzaville, les taux de TVA et la CA.
Conformément à l’actuelle loi des finances, le ciment n’est plus un produit de première nécessité, mais un produit de large consommation et doit être taxé à un taux réduit de 5% qui ne sera d’ailleurs pas payé par la Sonocc mais par les consommateurs.
« Nous ne sommes pas contre les entreprises. Elles sont nos partenaires mais notre rôle c’est de défendre à la fois les intérêts des partenaires et des consommateurs. Notre souhait est que la Sonocc vive, produit pour l’intérêt des congolais et que la population soit satisfaite de leurs prix pour ne pas voir leur pouvoir d’achat subir une érosion exagérée et sans raison», a fait savoir André Kamba.
Toutefois, abordant la question sur l’homologation des prix du ciment, il a précisé qu’au Congo, il y a deux types de ciment : le ciment importé, plus précisément celui qui arrive de Pointe-Noire et celui produit par la Sonocc. Tout ciment importé est obligatoirement homologué quand il arrive au Congo. À Pointe- Noire, ce type de ciment est vendu à 73.000 FCFA la tonne, mais lorsqu’il est transporté à Brazzaville, il coûte le même prix que celui de la Sonocc, notamment 105.000 FCFA. « Nous avions dit à tous les importateurs que malgré les dépenses qu’ils font, tous les prix du ciment doivent être alignés au prix de la Sonocc. Parce que, nous ne voulons pas avoir plusieurs prix sur le marché, ce qui poserait des difficultés dans le contrôle des prix », a conclu André Kamba.
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